Maman travaille

Au bureau

« Je sousignée, WM, autorise Madame NounouNelly à accueillir cette ChouChou à son domicile en qualité d’assistante maternelle agréée et aux conditions prévues par le présent contrat ».

Il y a des fois où on ne fait pas toujours ce qu’on veut. Notamment quand il s’agit de concilier vie privée et vie professionnelle. On aimerait pouvoir rester avec ses enfants, s’en occuper soi-même, tout en travaillant quand un seul revenu ne suffit pas.

De plus en plus de femmes confrontées à cette problématique font alors le choix de créer leur entreprise, pour pouvoir travailler de chez elle et ainsi garder leurs enfants dans le même temps, ou bien pour être suffisamment flexible pour que leur travail ne vienne pas occulter leur vie de famille: les rendez-vous chez le pédiatre ou les absences de la maîtresse ne sont plus un casse-tête de plus sur le planning. Tout est plus souple, on gère soi-même la semaine et les imprévus, sans avoir à demander l’aval d’un supérieur hiérarchique.

Et parfois on se dit qu’on pourra travailler avec bébé, pendant les créneaux de sieste, et quand il sera bien sage à jouer sur son tapis d’éveil au pied du bureau de maman. Qu’on pourra quand même traiter les 20 mails quotidiens, rédiger les 3 devis hebdomadaires, assurer les 15 coups de fil mensuels.

Je me suis dit cela, au début

– Tu choisis quoi, comme mode de garde?
– J’en choisis pas
– Ha? Mais comment tu vas faire?
– Dans un premier temps elle va rester avec moi, je travaillerai pendant son créneau de sieste et quand elle sera bien sage à jouer sur son tapis d’éveil.
– Mais tu penses que ça va être possible?
– Ben on verra. Si c’est pas gérable, j’aviserai. Si ça fonctionne, ce serait dommage de la faire garder si on peut l’éviter.
– Moui, moui, ok.

Je passais pour une extra-terrestre, à chaque fois. Mais je ne m’étais pas trop mis de pression: ça marche, c’est super, ça marche pas, tant pis et on prendra une nounou. J’aurais aimé réussir à faire comme certaines des mères freelances que je connais, pouvoir garder ma fille avec moi, passer du boulot au bébé, du bébé au boulot, 10 fois dans la journée et que ça fonctionne, que le boulot avance quand même. J’ai essayé. Ca n’a pas fonctionné.

Je fais un boulot technique et créatif. Je développe des sites webs, je crée des graphismes…j’ai besoin de créneaux de travail importants où je peux me plonger dans ma feuille de code et n’en sortir que quand les 400 lignes de mon objectif sont rédigées et que j’ai contrôlé le bon fonctionnement de mes instructions. En m’arrêtant en plein milieu, je perds le fil et quand je le récupère, il faut que je contrôle tout ce qui a été fait pour reprendre mon développement sans erreurs. Je pers un temps fou. Et avec ma fille dans les jambes, je m’arrête 5, 10, 15 fois par jour, pour finalement me dire que ça me fatigue et que je finirai « demain ».

Et demain arrive, et le scénario se répète. Je finirai encore demain. 15 demains sont passés, et je n’ai pas ou peu avancé. Je fais attendre mes clients, je me fais attendre. Je me retrouve, alors que depuis trois ans je m’étais fait une obligation de garder une séparation stricte entre mon boulot et ma famille, à travailler en maternant, à materner en travaillant.

Et je déteste ça

Ni à 100% sur mon boulot, ni à 100% avec ma fille et le résultat est tout à fait insatisfaisant. J’aime mon boulot, j’aime mes clients, et je veux retrouver ce qui avait, aussi, monté ma réputation dans mon réseau professionnel: travaille vite, disponible, à l’écoute. Au lieu de ça, un coup de fil aujourd’hui ressemble bien plus à un sketche de Florence Foresti qu’à un entretien professionnel…tant de travail depuis 3 ans pour risquer de tout perdre – et de devoir tout recommencer – il n’en est pas question.

Il faut ramener des sous à la maison, j’ai la chance d’avoir une entreprise qui a toujours bien fonctionné, qui m’a toujours dégagé un salaire décent, d’avoir des clients suffisamment satisfaits de mon travail pour ne pas aller voir ailleurs alors même que je me suis arrêtée complètement pendant 6 mois. Et il faut que ça continue. Alors il y a trois semaines, je sortais du Relais Assistante Maternelle de ma ville avec sous le bras la liste des 270 ( oÔ ) assistantes maternelles de mon secteur, bien décidée à trouver la perle.

Après avoir ciblé mes recherches par quartier, armée de ma liste de 25 nounous potentielles, je décrochais le téléphone. La première fut la bonne, c’est ce qui s’appelle avoir le cul bordé de nouilles. Accepte le lait maternel, respect du rythme de l’enfant, motricité libre (j’y reviendrai dans un prochain billet), ne laisse pas pleurer, accompagne le sommeil, petits aménagements dans l’esprit Montessori à plusieurs endroits de l’appartement. N’est pas contre le portage si ma fille a du mal à dormir seule, et si je lui laisse un porte-bébé. Le cul bordé de nouilles donc. Un premier rendez-vous la semaine dernière avec Lou, une heure et demie d’entretien, ma fille passera 20 minutes sur ses genoux à jouer avec ses cheveux.

Trois jours plus tard, nouveau rendez-vous, GrosChéri avec nous. Pendant près de 2h, Lou jouera par terre avec la petite fille de 2 ans et demi déja gardée chez NounouNelly. Comble de la chance: elle est à 400 mètres à pied de la maison. A la fin de ce rendez-vous, il est assez clair qu’on ne va pas chercher plus loin…et ce matin, vendredi 28 septembre, je revenais une troisième fois pour signer le contrat.

L’adaptation commence lundi…puis Lou sera gardée tous les après-midi de 13H30 à 18h30. Ainsi, je vais pouvoir retrouver mes créneaux de travail où je n’aurai à me soucier que de mon travail, et mes créneaux de bébé où je n’aurai à me soucier que de mon bébé. Ainsi, quand je quitterai mon bureau le soir à 18h15 pour aller chercher ma fille, je le quitterai pour de bon jusqu’au lendemain 13h45. J’ai hâte de retrouver la sérénité du travail fait dans les temps, et de ne plus me dire « bon, quand est-ce qu’elle dort que je puisse bosser?!? »

Depuis trois semaines que cette décision de garde a été prise, je prépare le terrain: j’ai loué un tire-lait chez Grandir Nature pour que ma fille continue de profiter de notre allaitement même hors de la maison, j’ai acheté un petit livre de recettes au lait maternel pour varier ses goûters, préparé des compotes d’avance….je reparlerai précisément de tout cela dans quelques temps.

Dans cette histoire, je suis très sereine

Autant, quand elle était encore toute petite, l’idée de la faire garder me terrorisait. Elle était encore allaitée exclusivement, pleurait dès qu’elle quittait mes bras…aujourd’hui elle passe des heures à jouer par terre, commence à goûter autre chose que le lait maternel, apprécie d’aller vers les autres et tend même les bras pour être portée par les gens qui nous entourent. Lors du second rendez-vous avec NounouNelly, elle a très vite tendu les bras vers elle et j’en ai été extrêmement rassurée.

Elle grandit. 6 mois, bientôt 7…je nous sens prêtes, toutes les deux, à nous séparer doucement un moment dans la journée.

Et ça commence dès lundi…

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