Les soirs de bain, elle dîne en pyjama. Les soirs sans bain, elle dîne dans la tenue du jour, puis passe un petit moment avec papa dans la salle de bain. On se débarbouille, on se change, on rigole un peu parce que les dents de papa qui mordillent les pieds, ça chatouille pas mal. Ensuite, elle revient au salon en disant « TaiTai! TaiTai! » (tétée, tétée! à prononcer avec des « ai » trèèèèèès ouverts^^), et on dit au revoir à tous les joujoux. Au revoir poupée, au revoir les animaux de la ferme, au revoir mon imagier de la montagne!
Puis, « Au revoir Papa, cette ChouChou va dormir! ». Et elle agite sa petite main dans tous les sens jusqu’à ce que son père soit hors de vue. « TaiTai, TaiTai, TaiTai! ». L’impatience se fait sentir…ce n’est pas la faim – elle sort tout juste d’un dîner complet et copieux. Mais c’est le soir, la fatigue et ses envies de bras tendres, l’heure du câlin ultime, les derniers baisers avant le lendemain, la dernière tétée avant la nuit. Elle le sait et elle en profite avec bonheur.
Sur son grand matelas deux places, à ras du sol, on a toute la place qu’on veut. On s’allonge, on s’étale, puis elle se colle à moi, couchée sur le côté, la tête au creux de mon bras. Elle tète doucement, et de sa petite main libre elle pince doucement la peau sur tout mon ventre, dans le cou, sur la poitrine. Elle pousse des petits soupirs discrets l’air de dire « mais on est trop bien là, non? ».
Parfois, elle se redresse et alors il faut la laisser vadrouiller sur son lit 5 minutes, parfois 10 ou 15. Lâcher prise, oublier l’idéal du coucher comme un moment calme. La laisser péter son petit câble, faire quelques roulades, lever les bras au ciel en criant « Mamaaaaaaaan! ». Et puis elle s’apaise. S’allonge. Reprend le sein, ou pas. S’endort ou sein, ou pas. Appelle son père, ou pas. Lorsqu’elle le réclame, il monte et me remplace sur le grand lit. Je ne sais pas ce qu’il se passe ensuite. Je sais juste que je n’entends plus un bruit et qu’il redescend une dizaine de minutes plus tard, les yeux éblouis par la soudaine clarté de la pièce.
Quand elle ne le réclame pas, elle reste là au creux de mon bras puis quand je sens qu’elle sombre, je retire doucement son appui et sa tête va se poser tranquillement sur l’oreiller tout fin qu’elle adore et sur lequel elle finit invariablement chaque nuit même quand elle ne s’y endort pas. Elle a pris l’habitude chez la nounou de dire « chuuuuuuut » au moment d’aller dormir. Alors juste avant de s’endormir elle me prévient: « Maman? Maman? Sssssssssssss, Sssssssssss ». Elle a encore du mal à le dire correctement.
Et puis elle sombre. il s’est passé 20 minutes, parfois 30, rarement plus. Pour certains ça parait tellement long, on me demande parfois si je n’en ai pas marre de ces couchers « interminables », si je ne me sens pas esclave à devoir être systématiquement présente jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Mais autant la journée, pour les siestes, ce sont des moments qui sont souvent compliqués, autant le soir je n’ai jamais vécu ces moments là comme des contraintes et elle-même ne vit pas du tout le coucher du soir comme ceux de la journée. Au contraire, je suis frustrée lorsqu’elle s’endort très vite dès la première tétée suite à sa journée trop remplie et pendant laquelle je ne l’ai pas assez vue.
Mais quand ce rituel dure un peu, qu’entre deux tétées elle reste allongée près de moi, tenant mes joues dans ses mains, front contre front en répétant inlassablement « Maman, maman, maman »…alors le coucher pourrait durer trois heures sans même que je m’en rende compte. Dans ces moments là je me fous pas mal de la pendule, je me gonfle à bloc de ces moments si précieux et de tout l’amour que ce bébé me donne.
Les « Maman » s’estompent, deviennent inaudibles, et elle s’endort pour de bon. Je m’imprègne une dernière fois de sa petite odeur de bébé en nichant mon nez dans son cou, et je lui dis que je l’aime. Puis je sors en prenant soin d’éviter les lames grinçantes du vieux parquet et je referme doucement la porte.
Bonne nuit, bébé.
Je dédie ce billet à tous les webzines parentaux qui savent si bien conseiller les parents sur les rituels du coucher et notamment à leurs experts qui affirment bien souvent qu’au delà de 10 minutes, le rituel est trop long et perd de son efficacité, ou ne permet pas à l’enfant de comprendre que la nuit on dort, ou que sais-je encore. Plus sérieusement, je dédie ce billet à tous ceux, pères et mères, qui croient en la douceur pour amener les rêves.
Image prise ici (diarabinany.centerblog.net/6525800-Bebe-dort)