Il y a deux ans, en ce 14 juillet, je faisais mes valises
Non pas pour partir en vacances, mais pour aller bosser. Je venais de finir mes études, et il fallait que je gagne des sous. Lesquels sous quitteraient aussitôt ma poche pour tomber dans celle de mon auto-école. Pour payer mon permis B. En cherchant des annonces de job d’été sur le net, j’étais tombée complètement par hasard sur une annonce d’une famille cherchant une baby-sitter pour les accompagner sur leur lieu de vacances et s’occuper des gamins durant tout le séjour. Bien payé, nourri, logé, transporté. A la plage pendant 30 jours. Je ne savais pas que ça existait, ce genre de trucs. Dans ma tête, les vacances en famille, c’était justement pour profiter des enfants qu’un travail trop prenant empêchait de voir le reste de l’année. Bref, ça m’interpelle, et je me dis que ça peut tout de même être intéressant comme plan: je bosse, certes, mais je me dore la pilule en même temps, je vais à la plage, à la piscine….tout ce que j’aime faire en vacances, le deal est plutôt sympa. Je concentre donc mes recherches sur ce type d’annonces, je dégote des sites spécialisés. Et du coup, je fais même la fine bouche. « 30 jours, 1500€. Côte Bretonne ». Arf, nan. J’aime pô la Bretagne. Enfin si, c’est beau, toussa. Mais l’été, il me faut du chaud, et du soleil. Voyons ce que je trouve d’autre.
Ah tiens, celle là a l’air pas mal…2 semaines en Corse, 2 semaines en Toscane. 2500€. Mais y a 5 gamins. C’est beaucoup, quand même. S’agirait pas que l’un deux se noie pendant que je fais un pâté de sable avec la petite. Je zappe. Et puis je tombe sur l’annonce « parfaite »: 2 gamines, 5 et 3 ans. 1200 euros. 15 jours au Pays Basque dans une maison louée, 15 jours à Ramatuelle (Côte d’Azur, pour ceux qui ne connaîtraient pas) dans une maison familiale. Tous frais payés. J’envoie un mail. J’explique à la mère que je suis très expérimentée en garde d’enfants, que j’ai 25 ans, et que je bosse avec des enfants en bas-âge depuis quelques années maintenant. Ils sont emballés, ils me donnent rendez-vous chez eux à Paris, me payent le train pour y aller et revenir. Objectif: voir comment le courant passe entre nous, mais aussi et surtout avec les petites. Passer un week-end chez eux pour « tester » nos compatibilités avant le départ. Normal, on ne confie pas ses gosses à n’importe qui.
A mon arrivée, la mère est clouée au lit par un lumbago, dans un appart en plein 16ème arrondissement de 200m² dont je te laisse imaginer le luxe intérieur. Je suis donc tombée dans une famille apparemment très riche. Je m’en doutais déjà, pour tout te dire, ne serait-ce que par leur capacité à ajouter 1200 euros à leur budget vacances. Dans l’épisode 2 je te raconterai pourquoi, au final, c’est 3000 euros que leur a coûté ma présence, mais patience, avant il faut que je te raconte autre chose.
Bref, je m’occupe des gamines tout le week-end. Je les emmène au parc, au jardin d’acclimatation, on fait une virée à la piscine, je donne les goûters, on joue, on dessine, je donne les bains. Les petites sont mimis, même si je décèle déjà chez la plus grande une certaine autorité de « petite fille riche ». La plus jeune en revanche, n’est pas encore atteinte. C’est « juste » une petite de 3 ans. Les parents sont plutôt sympas, on discute bien. Le week-end se termine, ils me disent que c’est bon, qu’ils se rendent bien compte que je sais exactement ce que je fais avec les gosses. Que je suis embauchée. Nickel. Avant que je reparte, ils me font un check-up complet de ma mission. Je comprends alors que je vais les remplacer, purement et simplement, pendant ces 30 jours. Ma mission, si je l’accepte, est la suivante:
- Assurer le petit-déjeuner des filles
- Les occuper jusqu’au déjeuner (baignades, jeux, bricolages…)
- Leur préparer le déjeuner
- Les faire déjeuner
- Sieste pour la minette, jeux avec la grande soeur, pendant les heures chaudes
- Baignade, jeux…
- Donner le bain du soir
- Préparer leur dîner
- Les faire manger, les préparer pour le coucher.
- Les mettre au lit, leur lire une histoire, les endormir.
En gros, m’occuper d’elles du matin au soir et du soir au matin. Soit. J’ai un peu de mal à comprendre la place qu’auront les parents dans la vie de leurs filles durant ces vacances « en famille » mais bon, à la limite ce n’est pas mon problème. Ils me décrivent ensuite le cadre du séjour. Première quinzaine: maison louée sur la côte basque. Avec une piscine. Deuxième quinzaine: nous serons dans la maison des grands-parents maternels. Dans les deux configurations, j’aurai ma chambre et une salle de bain privative, pour être tranquille quand je n’aurai pas les filles. J’aurai également un jour de congé par semaine. Ok, parfait.
A ce moment là et même avec le nom de famille de la mère sur les e-mails, je n’avais pas fait le rapprochement. J’allais dans une famille riche, mais une famille riche « X ». Une anonyme, comme il y en a beaucoup. Je découvrirai plus tard, lors d’une discussion sur nos vie respectives alors que l’on dîne dans un restaurant de Biarritz à la fin de la première quinzaine , que le grand-père maternel n’est autre que le patron (enfin l’ex-patron maintenant puisqu’il a été remplacé depuis) d’une des plus grosses boîtes françaises. Pour ne pas la nommer, je te dirai juste qu’elle tient en trois lettres et que tu lui verses régulièrement beaucoup (trop?) d’argent pour payer ton électricité. Je suis sûre que tu vois très bien de qui je veux parler.
Ce 14 juillet 2009, donc, je faisais mes valises et m’apprêtais à partir pour une expérience de 30 jours aux frontières du réel.