Pro-extrême

L'humeur du jour > Materner au quotidien

Extrême.

Extrême parce que je parle de l’allaitement en disant que c’est un acte noble, juste, nécessaire à l’enfant, inégalable en qualité et en échanges. Extrême parce que quand je lis une idée reçue sur la question, je la relève plutôt que de me taire et de participer à la désinformation massive, et ça embête le politiquement correct qui voudrait que l’on se taise car la question du choix est un immense tabou. Extrême parce que je refuse de dire « chacun fait bien comme il veut » et que je dis « le bébé lui n’a pas choisi ».

– Et pourtant. Pourtant, tout cela ne reste qu’un discours général, et surtout personnel. Affiché sur la toile car ce blog est un espace d’expression et de réflexion, pour moi comme pour ceux qui me lisent, on discute et on avance ensemble sur tous les sujets qui font, notamment, la maternité. Mais jamais je n’irais voir une femme qui donne un biberon en lui déroulant sous le nez une liste d’arguments détaillant pourquoi elle ferait mieux d’allaiter. Ca ne me regarde pas. Quand je parle ici de l’allaitement, je ne vais pas chercher les mères qui n’allaitent pas pour leur mettre mes billets sous le nez, je ne dis pas « tu » dans mes billets, je ne m’adresse à personne, je ne formule qu’une pensée. Mais pourquoi une femme n’étant pas pour l’allaitement aurait le droit de dire – et c’est ce qu’on voit partout – que l’allaitement est impudique, qu’il est malsain et que sais-je encore, ou tout simplement qu’elle a le droit de donner le biberon, alors qu’une femme qui allaite a juste le droit de se taire parce que dès que l’on défend cette pratique et qu’on refuse de se taire pour être politiquement correcte, on s’entend dire que l’on juge? J’ai un avis. Qui n’en a pas? J’ai un avis, je l’exprime, à destination de ceux qui veulent le lire, y réfléchir, l’accueillir pour ce qu’il est. Pas forcément s’y ranger d’ailleurs, mais en discuter entre adultes. Cet avis, j’ai le droit de le donner, de la même manière que celles qui n’allaitent pas donnent leur avis sur l’allaitement, et même si pour cela il faut accepter l’étiquette « extrêmiste de l’allaitement » qui pourtant ne me correspond tellement pas.

Extrême parce que je refuse catégoriquement et en toutes circonstances, sauf cas de force majeure et réelle impossibilité à agir, de laisser pleurer mon enfant. Pour quelque raison que ce soit. Extrême parce que pour y parvenir, et pour faire en sorte que les pleurs n’aient pas à être utilisés par elle comme moyen de me faire réagir, j’utilise et multiplie les usages qui les préviennent: allaitement à la demande et sans aucune restriction, portage intensif, sommeil partagé.

Extrême parce que, ma situation professionnelle de freelance le permettant, j’ai décidé de ne pas la faire garder en journée. Extrême parce que j’ai décidé de ne pas lui apprendre à accepter le biberon pour pouvoir passer une après-midi chez ses grands-parents. Extrême parce que je trouve que c’est beaucoup trop tôt et que sa place est avec son père et moi, et nulle part ailleurs.

Extrême parce que je porte ma fille le plus possible, extrême parce que je n’ai jamais utilisé de poussette sauf une fois quand mon bébé avait 15 jours.

Voilà, je suis extrême. Ce n’est pas moi qui le dit, ce sont les gens autour de moi. Des lecteurs aussi, que je croise au détour d’autre pages et qui parlent de moi, de mes idées, de ce blog, en ces termes. Extrémiste du maternage, j’étouffe ma fille, mère castratrice, en m’occupant trop d’elle, en pratiquant un maternage excessif, en l’aimant à outrance. C’est sans doute pour cela qu’elle est aussi facile à vivre d’ailleurs….je me rappelle à ce titre le billet de Nad’In’Box que j’avais trouvé très juste.

Des chemins tous tracés

C’est ce que nous propose la société moderne, avec ses traditions éducatives sans âge, et surtout d’un autre âge. Un certain obscurantisme, ou un obscurantisme certain. C’est ainsi qu’on peut encore entendre des pédiatres défendre la méthode des pleurs contrôlés, affirmer que les pleurs font les poumons des bébés. C’est ainsi qu’on peut entendre trois fois par jour qu’il faut faire attention, avec l’allaitement, si ça se trouve le lait n’est pas assez nourrissant, et puis tu sais, les laits artificiels, si c’était mauvais ça se saurait.

Non, justement, ça ne se saurait pas. Il y a trop d’argent en jeu, mais c’est un autre débat.

Finalement, dès que l’on se dit que ces chemins sont peut-être un peu trop fades, un peu trop bien délimités pour être honnêtes, un peu trop rectilignes pour être instinctifs, dès que l’on cherche à savoir si on ne pourrait pas faire autrement, avec plus de douceur, moins de pleurs, moins de pression, plus d’instinct, alors les pancartes se hissent. Extrêmiste, mère castratrice, possessive, étouffante.

Mais qui juge, là? Qui se permet de mettre les mères dites « maternantes » face à des termes destructeurs et insultants?

Trop, excessif, à outrance.

Trois termes qui accompagnent de plus en plus le mot « maternage ». « Les enfants trop maternés », « le maternage excessif », « materner à outrance ».

Kezako? Ca existe, ça? D’autant que dans la majeure partie des cas, on peut lire ou entendre cela concernant des petits bébés, entre 0 et 1 an et, souvent, des nourrissons de moins de 6 mois.

Ca existe, ça, « trop » materner un bébé de deux mois? Ca existe, ça, le maternage excessif? Ca existe, ça, envelopper un nourrisson de « trop » de sécurité et d’amour?

« Il ne faut pas trop habituer le bébé aux bras, sinon … »
« Il faut laisser pleurer les bébés, sinon…. »
« Il ne faut pas trop s’en occuper, sinon…. »

Ne pas trop s’occuper d’un bébé. Donc, il y aurait une sorte de timing, une ordonnance, un juste dosage, une durée limite au delà de laquelle on prend des risques. Prescription pour le mois suivant: « le bébé sera materné à raison de 4 heures par jour au maximum. Au delà, le crédit consommé sera déduit des jours suivants ».

Ici, j’annonce la couleur: on est en forfait illimité 24/24, soir et week-end.

Les extrêmistes sont des feignantes.

Si si, je vous jure. Parce que je ne laisse pas pleurer mon bébé, alors je n’ai pas à subir le stress engendré par les pleurs de longue durée. Parce que j’allaite mon bébé, alors j’ai une baguette magique en toute situation. Parce que je porte mon bébé, je peux vivre ma vie quotidienne les mains libres, en mouvement, tout en répondant au besoin de proximité naturel de ma fille. Partisane du moindre effort, si je suis extrémiste à vos yeux, je suis tellement sereine dans les miens. Parce que le maternage à outrance m’offre une vie avec bébé tellement simple. Tout au feeling, sans pression, on surfe sur la vague. Je ne dis pas que c’est facile. Mais c’est calme. Sans violence et sans stress.

Alors si c’est ça, être extrémiste, et bien je veux bien l’être, j’en suis même flattée voyez-vous.

Je souris juste de constater que ce mot, bien souvent, est prononcé par celles qui affirment haut et fort qu’elles ne veulent pas être jugées.

Une histoire de paille et de poutre, sans doute.

L’Extrémiste, illustration de l’Insolente Veggie, à découvrir sur le blog
http://insolente0veggie.over-blog.com/ (insolente0veggie.over-blog.com/)

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